
Peut-on vraiment dire qu’un arbre meurt de « vieillesse » ?
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Dans l’imaginaire collectif, un chêne millénaire finit par s’éteindre parce qu’il a simplement atteint la limite de son horloge biologique. Mais la réalité forestière est plus nuancée : les arbres ne possèdent pas de programme de mort prédéterminé comparable à celui des mammifères. Ils succombent le plus souvent à une combinaison de stress externes—tempêtes, sécheresses, parasites, incendies—auxquels vient parfois s’ajouter un lent déclin physiologique lié à l’âge.
Chez les plantes ligneuses, le vieillissement se manifeste surtout au niveau des organes : feuilles, branches et racines suivent des cycles de croissance, de sénescence puis de remplacement. Le tronc, lui, s’épaissit année après année grâce au cambium, ce tissu méristématique capable de produire de nouveaux anneaux de bois tant qu’il reste protégé. Tant que la circulation de sève n’est pas interrompue, techniquement, l’arbre peut se maintenir indéfiniment.
Pourtant, des signes d’usure s’accumulent. Les cellules les plus anciennes, situées au cœur du bois, deviennent inactives ; elles ne meurent pas mais cessent de conduire l’eau. À mesure que la hauteur augmente, la gravité complique la montée de la sève : la pression négative nécessaire devient telle que le moindre épisode de sécheresse peut provoquer la cavitation des vaisseaux, créant des bulles d’air fatales. Plusieurs études menées sur les séquoias et les eucalyptus indiquent qu’autour de 100 mètres, le système hydraulique approche sa limite physique : la croissance ralentit, la couronne se réduit, la photosynthèse pâtit.
En parallèle, la défense chimique faiblit. Des travaux parus en 2018 dans New Phytologist montrent que les conifères très âgés produisent moins de résines antifongiques, rendant leurs cernes internes plus vulnérables aux champignons lignivores. Les pathogènes profitent alors des micro-fissures créées par le vent ou la glace pour s’installer et fragiliser les racines. De son côté, l’accumulation de mutations somatiques dans les méristèmes, bien que lente, peut altérer la régulation hormonale et la capacité de cicatrisation.
Ainsi, le scénario le plus courant ressemble moins à une mort « naturelle » qu’à une série d’assaillants profitant d’un organisme affaibli : un orage arrache une grosse branche, l’humidité s’infiltre, un champignon pourrit le cœur, puis un coup de vent achève l’édifice. Dans les rares forêts exemptes de perturbations majeures, certains individus dépassent quand même les trois, quatre voire cinq millénaires—le pin de Bristlecone en Californie, des ifs d’Europe ou l’olivier de Vouves en Crète. Leur longévité exceptionnelle prouve que l’espèce-arbre, en théorie, dispose d’un potentiel de vie quasi illimité.
En conclusion, on peut dire que les arbres ne meurent pas « de vieillesse » au sens biologique strict ; ils meurent parce que le temps allonge la liste de leurs ennemis et fragilise peu à peu leurs défenses. La vieillesse n’est pas la cause directe, mais elle rend inévitable la rencontre avec un facteur létal.
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