Projet Anastasis

Vous avez opté pour l’auto édition sur Amazon : quels ont été les atouts de cette plateforme dans la publication ?

Ce choix s’est fait naturellement en 2012. Avec le désir de partager un roman et la certitude que le premier livre d’un écrivain inconnu n’attirerait pas un éditeur, nous avons tenté l’aventure avec cette plateforme qui venait d’ouvrir en France. C’est la simplicité d’édition qui a été le facteur déclenchant.

Votre épouse a un très grand rôle dans votre carrière d'auteur, peut-on dire que vous formez une équipe ?

Jacques Vandroux est en fait une sorte de trinité, mais à deux : c’est un nouveau concept. Mon épouse tient le rôle de correctrice, d’éditrice et s’occupe de toute la partie administrative. C’est elle qui a d’ailleurs mis le premier livre en ligne… et tous les autres ensuite.

Vous pourriez presque être considéré comme un phénomène d’auto-édition : un tel succès était-il un objectif envisagé avec ces livres ?

Toute personne qui publie un livre, quel que soit le mode de publication, rêve de voir un jour son œuvre reconnue par des lecteurs. Mais notre objectif, plus réaliste, était de le mettre à disposition pour la famille ou des amis. Le découvrir au bout de trois mois en tête des ventes numériques sur Amazon était totalement incroyable et inespéré.

Vos histoires possèdent souvent ce suspense, à mi-chemin entre le réel et le fantastique : où puisez-vous l’inspiration ?

Depuis que je lis, j’ai toujours eu une attirance particulière pour les contes, les légendes, tous ces écrits mystérieux qui nous laissent naviguer entre rêve et réalité. On a besoin de cette part d’inconnu, besoin de se dire que l’esprit humain ne maîtrise pas tout et que des événements le dépassent. C’est peut-être mon côté scientifique qui montre que plus on apprend, plus on se rend compte de ce qui nous échappe. C’est ce que je retranscris dans mes romans.

Le testament de l'alchimiste

Votre dernier livre publié sur Audible est Le testament de l'alchimiste : on suit Nadia Barka, capitaine de la PJ grenobloise, que l’on suit régulièrement : comment est né ce personnage récurrent ?

Nadia Barka n’avait initialement pas la vocation à être un personnage principal et encore moins de revenir dans un autre roman. Faire intervenir des figures récurrentes ne me tentait pas. Alors pourquoi la retrouve-t-on à trois reprises, me direz-vous ? Nadia Barka était d'abord une enquêtrice, un peu passive et victime d’ailleurs, qui était juste là pour permettre au récit d'avancer. Au bout d’une quinzaine de chapitres, ce flic trop pâle ne me plaisait plus. Je lui ai donc donné un caractère plus batailleur, j’ai réécrit une partie de l’histoire et elle a pris une place de plus en plus importante, jusqu’à devenir un des acteurs majeurs de Au Cœur du solstice.

De quelle manière avez-vous décidé de la travailler, notamment sa psychologie, etc, pour la rendre crédible sur la durée ?

Après Au Cœur du solstice, j’ai écrit Projet Anastasis qui n’avait aucun rapport avec le précédent. M’est ensuite venue l’idée de tenter une expérience : faire revenir un personnage. C’est Nadia qui a tout de suite tenu la corde. Je me suis heurté à une difficulté : n’ayant pas prévu de la voir enquêter de nouveau, je n’avais semé aucune piste dans Au Cœur du solstice. Il fallait alors que je trouve de nouveaux ressorts pour qu’elle puisse attirer les lecteurs. Dans Le Sceau des sorcières, je l’ai donc plongée dans une situation complexe, avec une dépression postnatale, un caractère violent et des conflits avec ses proches. L’aventure a été compliquée pour elle, et elle termine l’histoire entre la vie et la mort. Mais je pense que ses faiblesses l’ont rendue attachante. J'imaginais en rester là, mais de nombreux fans de Nadia ont demandé à la retrouver. L'idée a fait son chemin et deux romans plus tard, je l’ai remise en scène dans Le Testament de l’alchimiste. Le travail sur sa psychologie a été plus simple : elle avait toujours son caractère de feu, mais l’épreuve précédente l’avait apaisée. C’est donc une facette inédite du personnage que j’ai pu développer. Et voilà que Nadia a droit à un nouveau rappel par ses aficionados. Pourquoi pas une quatrième enquête, mais uniquement si je trouve une intrigue digne d’elle !

Selon vous, un bon personnage peut-il faire tenir une mauvaise histoire ?

J’ai du mal à imaginer un auteur créant un bon personnage et une mauvaise histoire. Je pense qu’il est plus compliqué de mettre en place les protagonistes (bons ou méchants) d’un polar ou d’un thriller que de développer un scénario. En fin de compte, les histoires que l’on retrouve depuis des années ou peut-être des siècles sont toujours bâties sur des trames similaires. Prenez les contes de Grimm et vous avez tout ! Donc si l’auteur a su trouver les traits de caractère qui rendent ses personnages intéressants, je pense que l’histoire doit l’être aussi… bon, ce point de vue n’engage que moi et j'imagine qu’on m'opposera des contre-exemples.

Vos lecteurs sont très fidèles, quel genre de relation entretenez-vous avec eux/elles ?

Nous avons la grande chance d’avoir beaucoup de lecteurs fidèles et nous essayons de leur rendre la pareille. Je vais disgresser, mais quand on parle de la chaîne du livre au sens large, on oublie parfois celui qui en est le cœur et sans lequel toutes ces organisations s’effondreraient : le Lecteur. Je rappelle régulièrement que pendant des années, je racontais tous les soirs des histoires à mes enfants, comme mon père l’avait fait avec moi. C’est cette relation qui est magique. Si j’écris et que personne ne me lit, mes personnages sont morts. Les lecteurs donnent donc vie à nos livres. Nous leur en sommes extrêmement reconnaissants et de très belles amitiés se sont liées avec certains d’entre eux. Ce sont nos lecteurs qui nous donnent envie de continuer notre aventure. Nous tenons nos lecteurs au courant de nos nouvelles sorties, échangeons très régulièrement sur les réseaux sociaux, et participons à divers jeux, concours, livres voyageurs…

Le sceau des sorcières

Pourriez-vous dire que vous écrivez les livres que vous aimeriez lire ?

Exactement. J’ai souvent écrit sans plan, parce j’aime me surprendre en commençant un chapitre et en m’apercevant à la fin que je viens d’avoir une idée géniale… ou au moins correcte. Je suis mon premier lecteur, alors je ne veux pas m’ennuyer.

Au final, savez-vous pourquoi vous écrivez ?

Au début, j’aurais dit pour raconter des histoires, à moi et aux autres. Et c’est toujours vrai. Mais avec le temps, j’ai découvert le plaisir de créer des personnages qui m’ont accompagné jour et nuit pendant des années. Ils sont devenus des proches et j’ai eu envie de développer leur vie, leurs relations. Un fantasme refoulé de démiurge ?

Selon vous, qu’est-ce que le livre audio permet de faire ressortir de vos histoires ?

Je pense que j’ai donné la réponse plus haut. Pour moi, une histoire racontée est encore plus vivante qu’une histoire lue. Pendant des millénaires, les histoires se sont transmises à la veillée. C’est peut-être aujourd’hui sur un smartphone (profitons de la technologie), mais la tradition orale est toujours là.

Votre dernier livre coup de cœur ?

Canicule, de Jane Harper

Multiplication

Crédit photo : Astrid di Crollalanza