De nos jours, on pourrait croire que Stan Lee a inventé les super-héros. Tant de personnages qu'il a contribué à créer explosent sur les écrans à travers des sagas et films Marvel comme X-Men, Iron Man, ou encore le phénomène pop-culture Avengers : Infinity War. La sortie de ces films stimule l'imagination de millions de personnes à travers le monde !
Cependant, le créateur de légende n'a pas fait naître le genre du super-héros à lui tout seul ; les justiciers costumés se battaient pour la vérité et la justice au moment même où Lee se lançait dans le monde de l'édition.

Ce que Stan Lee a fait était sans doute plus important : il a aidé à les réinventer.

Avant que Marvel Comics ne publie le premier numéro de Les Quatre Fantastiques (Fantastic Four) en 1961, la plupart des histoires et des personnages de super-héros étaient basés sur des archétypes bien connus et prévisibles.

Le paysage de l'édition, dominé par des personnages comme Superman et Batman de l’univers DC Comics, présentait des intrigues à numéro unique qui n'étaient pas reliées entre elles et des héros dont la vie n'était jamais perturbée que par des évènements externes.

Lorsque les Quatre Fantastiques, Spider-Man et Hulk ont fait leur apparition lors des débuts de Marvel, ils avaient des faiblesses et des défauts qui étaient d'une humanité rafraîchissante.

Avant les années 1970, Batman ne se préoccupait jamais vraiment de comment payer les factures ou de la santé de son majordome et père de substitution, Alfred Pennyworth. Cependant, presque tous les numéros des premières BD de Spider-Man voyaient Peter Parker s'inquiéter du bien-être de tante May et de la façon dont il pouvait l'aider à payer les factures. L'Homme d'acier, quant à lui, a fait preuve d'une maîtrise presque parfaite de ses émotions bien qu'il soit un étrange visiteur venu d'une autre planète ; le stress de sa double vie de Clark Kent et de Superman a rarement provoqué des accès de rage incontrôlables. Si c'est le cas, la colère et les conséquences ont été effacées à la fin d'une des histoires de Superman. Hulk a vécu une autre sorte de vie hors du commun après être né suite à l'explosion d'une bombe à énergie gamma radioactive. Les identités divisées de Bruce Banner, à la fois scientifique et monstre, se sont entre-déchirées, en colère contre leur existence partagée et la façon dont les humains le traquaient même après qu'il ait sauvé des innocents de méchants et de tyrans en puissance. Hulk se détestait, un sentiment que Superman ignore.

Stan Lee et ses co-créateurs ont inauguré une nouvelle sorte de paradigme du super-héros.

Les personnages de la maison d'édition apparaissaient dans les histoires des uns et des autres et commentaient les grands événements de l'univers, créant un sentiment d'interconnectivité qui semblait vibrant et frais.

Une fois que Stan Lee et ses co-créateurs ont inauguré une nouvelle sorte de paradigme du super-héros, le genre tout entier a suivi l'exemple des comics Marvel. Au fil des décennies, il était devenu impossible de ne pas tenir compte de l'influence de Lee, car les histoires de super-héros exploraient des idées psychologiques et existentielles plus complexes sur ce que signifiait avoir du pouvoir.

En outre, les décors des aventures de Daredevil et Iron Man n'étaient pas des lieux fictifs comme Metropolis et Gotham City. Les héros de Marvel se sont balancés et ont volé à travers Manhattan, une ville qui se voulait reconnaissable pour les gens qui y vivaient et séduisante pour les autres. Comme le dit Lee dans une citation souvent citée, il voulait que l'univers fictif dépeint dans les bandes dessinées de Marvel ressemble au monde que vous voyez par votre fenêtre.
Bien que le monde que les lecteurs peuvent voir par la fenêtre ait beaucoup changé, l'un des derniers projets de Stan Lee démontre encore le désir d'enraciner les exploits super-héroïques dans une sensibilité qui puise dans des expériences quotidiennes familières. Alliances: A Trick of Light, de Stan Lee narré par Yara Shahidi, présente plusieurs des approches qui sont devenues la marque de fabrique du style éditorial des comics Marvel à l'apogée de l'entreprise au début des années 1960. Le personnage principal Cameron Ackerson débute en tant que YouTuber, un outsider arrogant et insolent s'aventurant dans des situations dangereuses avec des gadgets high tech de sa propre création. Ce modèle es un peu inspiré de personnages comme Johnny Storm/la Torche humaine et Rick Jones, des adolescents avec plus d'ambition que de sens, ils sont apparus dans Fantastic Four et les bandes dessinées Hulk écrites par Lee. Après avoir été grièvement blessé dans une tempête électrique, Cameron découvre qu'il a des pouvoirs qui lui permettent de communiquer et de manipuler presque tous les types d'appareils technologiques. Ces pouvoirs sont plus une malédiction qu'une bénédiction au début, et cela transforme le jeune protagoniste en quelque chose qui ressemble davantage à un mutant des X-Men. Cameron craint qu'il soit devenu un monstre et que son évolution en quelque chose de plus qu'humain fasse que ses pairs le haïssent et le craignent, comme Cyclope, Rogue, Wolverine et les autres héros mutants qui ont été traqués et persécutés dans l'Univers Marvel.
La patte de Lee se ressent également sur l'autre personnage principal de l'histoire. Le personnage féminin principal de A Trick of Light est Nia, une prodige intellectuelle élevée dans un isolement quasi total, son seul contact avec d'autres personnes sur Internet. Nia rappelle Crystal, la jeune femme qui maniait les énergies élémentaires au sein de la famille royale des Inhumains. Dotée de structures génétiques modifiées par des êtres cosmiques il y a des siècles, l'ancienne société des Inhumains a existé en dehors de la société moderne pendant des siècles jusqu'à la rencontre avec les Quatre Fantastiques. Crystal a grandi à l'abri du reste du monde pendant une grande partie de sa vie et sa romance avec la Torche humaine a servi d'introduction à la planète.

Sous les costumes moulants, les personnages des récits écris par Lee et ses partenaires étaient encore des êtres humains.

Nia et Cameron se rencontrent pour la première fois dans le style classique de Stan Lee/des comics Marvel, où les personnages héroïques s'affrontent souvent lors de leurs premiers contacts pour des raisons d'identité erronée et de désinformation. L'affrontement entre Nia et Cameron se déroule dans l'univers numérique d'un jeu vidéo multijoueur et fait l'objet d'une mise à jour moderne. Nia se présente dans un match que Cameron dominait sans effort après avoir obtenu ses superpouvoirs de technopathie, l'humilie dans une impressionnante démonstration d'adresse, et disparaît sans laisser de trace. Ils se rencontrent à nouveau, devenant des alliés et finalement beaucoup plus, un autre hommage thématique à l'œuvre Marvel classique de Lee.
Alors que Crystal et la Torche humaine tombaient amoureux, l'héroïne inhumaine a commencé à utiliser ses capacités pour aider le monde entier. Nia et Cameron suivent un parcours similaire lorsqu'elle commence à l'aider à rendre une justice emplie de sarcasme sur Internet qui dénonce et punit les brutes et les experts de la haine qui l'ont inspiré.
Le commentaire médiatique qui surgit dans A Trick of Light présente Cameron comme une célébrité de deuxième rang après son expérience de mort imminente et ses premières tentatives de faire le bien sur Internet. Les intrigues classiques imaginées par Lee et ses acolytes ont fait la même chose avec le concept de célébrité il y a des décennies. Peter Parker a d'abord utilisé ses capacités d'araignée pour gagner de l'argent dans des matchs de lutte et apparaître dans des émissions de télévision. Une des premières histoires des 4 Fantastiques voyait la famille des aventuriers piégée dans une intrigue déguisée en une production cinématographique. Stan Lee, Jack Kirby et leurs collaborateurs ont fait valoir que les personnes ayant des capacités fantastiques et une existence plus grande que nature ne voudraient pas toujours revenir à l'anonymat et à la précarité. Sous les costumes moulants, les personnages des contes créés par Lee et ses partenaires étaient toujours des êtres humains.
C'est toujours le cas dans A Trick of Light. La mise en scène mélodramatique du projet oppose des personnages un peu névrosés, naïvement idéalistes et héroïques à des conquérants potentiels machiavéliques. L'idée d'une humanité accessible s'étend même à un méchant extraterrestre, dont la soif de vengeance est alimentée par des raisons le rendant en parti sympathique. Si vous vous mettiez à la place de Cameron Ackerson, Peter Parker ou Nia, vous comprendriez probablement pourquoi ils font ce qu'ils font. Stan Lee voulait que le public trouve des émotions et des frustrations familières parmi les pouvoirs métahumains fantastiques, et croyait que nous aussi pourrions essayer de rendre le monde plus juste et plus coloré à notre façon.

Traduction Francaise : Nicolas Bert

Stan Lee’s Alliances : L’Éclair du Génie